Hommage au regretté musicien Si Mustapha Bahar
Le roi de la kouitra
Le regretté
Si Mustapha Bahar
Membre de l’ensemble de la Société des concerts du
conservatoire d’Alger, puis soliste à l’orchestre de la RTA dès sa création,
son jeu nous envoûta durant de longues et belles années, il connut les
directions de Mohamed Fakhardji, Abderrezak Fekhardji, Mustapha Skandrani,
Zerrouk Mokdad et la compagnie des plus illustres noms de la nouba algéroise…
Cet artiste
exigeant et curieux de tout a poussé l’élégance et la subtilité
«mandolinistique» à son paroxysme, lui conférant un discours d’un intimisme
bouleversant. Cet intimisme résonne en écho à une philosophie de vie fuyant les
scènes artistiques désormais vendues aux décibels, aux paillettes et au mercantilisme…
Son jeu si
particulier, composé d’un doigté caressant et chatouillant les cordes, alliait
à la perfection la préciosité de l’arabesque et l’émouvante austérité propre à
l’esthétique arabo-andalouse. Contre l’invasion de l’ornementation excessive
polluant le discours musical, notre artiste était un fervent défenseur de la
limpidité, obtenant de sa snitra des notes perlées au sens si profond.
A ce propos,
Si Mustapha Bahar exhibait son leitmotiv préféré : «Un grain de beauté fait le
visage attrayant, sa multitude un repoussoir !!! »
Avec son immense et exceptionnelle connaissance du répertoire et son art consommé de la snitra enchanteresse, notre grand artiste est resté fidèle au joyau philosophique et esthétique de la nouba : simplicité et modestie au service de la musique. «Servir la musique et non s’en servir», aimait-il répéter. Fort loin des égos surdimensionnés qui déforment et trahissent l’esprit de notre belle musique, il les appelaient les frelons envahisseurs…
Avec son immense et exceptionnelle connaissance du répertoire et son art consommé de la snitra enchanteresse, notre grand artiste est resté fidèle au joyau philosophique et esthétique de la nouba : simplicité et modestie au service de la musique. «Servir la musique et non s’en servir», aimait-il répéter. Fort loin des égos surdimensionnés qui déforment et trahissent l’esprit de notre belle musique, il les appelaient les frelons envahisseurs…
Si Mustapha
Bahar a renoué avec la pratique musicale ayant cours jusqu’au début du XXe
siècle : le cercle familial ou la petite cour des aficionados humant la moindre
nuance, s’émouvant à la magie d’une inflexion dont les vrais maîtres avaient le
secret. Le tarab avait du sens…
Notre noble
artiste fut digne de ses filiations :
L’émouvante
snitra de Omar Hibbi et l’enchanteur Kyatri Ahmed Sebti ne l’ont jamais quitté,
peuplant ses rêves et abreuvant son inspiration. Il les évoquait sans cesse.
Rappelons que ces deux illustres musiciens furent les disciples du père de ammi
Mustapha : Mohamed Bahar, dit El Hassar, le tisserand qu’il fut et dans
l’atelier duquel convergèrent tous les grands noms de la nouba algéroise de
l’époque pour étancher leur soif de savoir auprès d’une source fiable et intarissable.
Naturelle compagnie de la quotidienneté et de l’attachement à un fil
conducteur.
Et la
hantise de le perdre. Avec courage et abnégation, Si Mustapha Bahar a su se
hisser aux cimes d’un minimalisme propre aux interprètes de génie.
Il doit
énormément à son père pour sa connaissance du répertoire andalou : Mohamed
Bahar, que les grands noms de cette musique sollicitaient pour sa grande
mémoire. Mohamed Benguergoura et l’irremplaçable Dahmane Benachour venaient de
Blida en calèche puiser dans le répertoire de ce généreux donateur. A la
moindre demande, ce petit commerçant fermait boutique, se saisissait de sa
kwitra pour dispenser son immense savoir et transmettre le flambeau à une autre
génération.
La famille Bahar nous a donné un autre grand artiste, le cousin de Mustapha : Mohamed Behar, le roi de la kwitra et modèle pour tant de générations !
La famille Bahar nous a donné un autre grand artiste, le cousin de Mustapha : Mohamed Behar, le roi de la kwitra et modèle pour tant de générations !
Soucieux de
conjurer ce dicton de Amadou Hampâté Bâ, selon lequel une bibliothèque brûle à
chaque décès d’un vieillard africain, Si Mustapha Bahar n’a cessé de
transmettre son savoir, aussi bien en Algérie qu’en France, où il enseigna à
Bourges avec son cousin Mohamed. Ammi Mustapha, tu peux partir en paix pour
avoir su donner jusqu’à ton dernier souffle de centenaire…
Merci pour cet exigeant et toujours élégant compagnonnage que j’ai eu le grand privilège de partager avec ton autre fidèle disciple : Cheikh Zerrouk Mokdad, actuel dirigeant de l’Ensemble régional d’Alger .
Merci pour cet exigeant et toujours élégant compagnonnage que j’ai eu le grand privilège de partager avec ton autre fidèle disciple : Cheikh Zerrouk Mokdad, actuel dirigeant de l’Ensemble régional d’Alger .
Ta
simplicité, ton élégance, ta délicatesse et la générosité avec laquelle tu nous
recevais, la finesse avec laquelle tu nous embarquais dans tes savoureuses
anecdotes nous manqueront à jamais. Et les perles sonorités de ta délicieuse
snitra nous accompagneront toujours…
Paix à ton
âme et joyeuses retrouvailles de ta merveilleuse snitra avec l’incomparable
kwitra de Si Mohamed dans les jardins de l’Eden !
Allah yarhamkoum !Amîn !
Allah yarhamkoum !Amîn !
(*) Dirigeant de l’Ensemble Albaycin
Fondateur de l’Ensemble national et son premier dirigeant
Fondateur du Festival international de musique andalouse et des musiques anciennes
Fondateur de l’Ensemble national et son premier dirigeant
Fondateur du Festival international de musique andalouse et des musiques anciennes
El Watan le 28.11.17
Illustration Vidéo
Daboudj1948
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