Le maître luthier, Mohamed
Chafaa n’est plus
APS.Publié Le : Jeudi, 20 Janvier 2022 16:10
ALGER- Le maître luthier, Mohamed Chafaa est décédé, jeudi matin à Alger, à l’âge de 89 ans,laissant derrière lui des chefs d'œuvres d’instruments, façonnés de ses mains et qui auront sillonné le parcours et la carrière de "tous les artistes et musiciens de renom", ont estimé ses proches.
Les
mandoles d’El Hadj M’Hamed El Anka, Amar Ezzahi , El Hadj El Hachemi Guerouabi
et P’tit Moh, Sid Ahmed Naguib et Mohamed Kabour, respectivement surnommés, le
"magicien" et le "tailleur" du banjo, le violon de Hamidou,
la variété de guitares de Abdeslam Derouache, et pleins d'autres encore des
plus grands musiciens et chanteurs de toutes les régions d’Algérie, ont joué
leurs plus belles notes sur un instrument signé "Mohamed Chafaa ",
l’"Incontestable maître luthier".
Sa
réputation a été telle, que les sonorités des instruments auxquels il aura
donné vie, sont passées à l’autre rive de la Méditerranée et bien plus au delà
encore.
L’enterrement
du défunt est prévu durant l’après-midi, au cimetière de Oued Romane (banlieue
d’Alger).
Entreprise
familiale CHÂFAA de fabrication de luth.
Par DZEntreprise Dernière mise à jour 2013/07/01
Les
deux tiers de la commande émanent de musiciens.
Cette petite entreprise familiale, un
héritage transmis de père en fils depuis des siècles, est aujourd’hui le refuge
de nombreux artistes, et pas que, qui viennent chercher leur
« bonheur » chez les Châfaa.
L’entreprise dans laquelle on travaille
en famille, est implantée à El-Achour dans la commune de Delly Brahim à Alger.
Cette petite fabrique, mise entre parenthèses durant la guerre de libération, a
été ramenée à la vie, après l’indépendance par Mohamed Châfaa, le père du
propriétaire actuel.
Rachid avait dès l’âge de 12 ans touché
au bois. Il en fera, de l’avis de ses clients, « des merveilles ».
«J’ai toujours vu mon père et mon oncle fabriquer des instruments musicaux, un
métier dont je ne voyais que le côté obscur, vu que ce n’est pas un métier
facile ; alors que l’Algérie était encore colonisée, j’ai découvert un
univers merveilleux lié directement à ce métier ».
Une délivrance !
Rachid Châfaa nous accueille dans son
atelier avec son ainé. A ce dernier, il compte passer le témoin. La relève est
assurée. Le petit atelier, ou foisonnent des pièces en attente de finition.
,c’est autant d’instruments musicaux en chantier et dont la majorité a été
commandée par des musiciens algériens.
L’atelier est divisé, sans l’être
vraiment, en de petits ateliers.
L’un de débit où l’on déligne et découpe les pièces de bois où règnent
d’imposantes machines. En premier lieu, c’est l’odeur agréable du matériau,
combiné à la simplicité et à l’hospitalité des artisans-artistes, nous plonge
dans une atmosphère des plus sereines. Ici, l’expression « joindre l’utile
à l’agréable » trouve tout son sens.
Pourtant nous sommes bien dans une fabrique.
Les Châfaa, fabriquent aujourd’hui entre
10 et 15 instruments par an, une dizaine est destinée à l’exportation dont des
violons, des guitares, des guitares électriques, des aaôud, des banjos et des
guitares à double manches. Et les étapes et procédés de fabrication diffèrent
d’un instrument à l’autre.
Tout commence par la réalisation et la
lecture du plan où l’artisan crée l’instrument, puis le traçage et la découpe
du bois qu’on aura au préalable bien choisi.
S’agissant du choix du bois , Rachid
Châfaa confie à DZEntreprise que trouver la matière qu’il faut reste très
compliqué dans notre pays «Parfois même inaccessible. Par exemple, j’aime
beaucoup l’érable anglais à cause de ses belles rayures.
La pièce de bois est prise à l’axe de l’arbre et séchée pendant très longtemps.
Le bois ne doit pas se déformer, ce qui fait de lui la matière la plus chère
dans la fabrication des instruments .»
Un coût que l’artisan peut difficilement
intégrer dans le prix de vente de l’instrument.
Une parenthèse que notre hôte ferme très vite, pour nous raconter avec une gestuelle
propre aux artistes et aux Algérois la découpe du bois, « on obtient la
pièce essentielle pour la fabrication de l’instrument musical jusqu’au
vernissage et la finition » et à la manière dont les Châfaa décrivent le
métier, on ressent toute la passion que l’artisan luthier met pour « On y
met toute notre âme.
Il faut beaucoup de concentration pour
ne pas se tromper dans les calculs nécessaires pour le placement des cordes et
donc des notes musicales.
La fabrication des instruments musicaux
est un travail très délicat.
L’usinage du corps où on donne à l’instrument sa forme finale, le travail sur
le manche, l’enclave et le corps où on fixe le manche au corps, qui diffère
bien sûr d’un instrument à un autre.
Après la finition du corps jusqu’à la
fixation des cordes, vient le montage des pièces restantes, notamment le micro
et les câblages (en particulier pour les guitares électriques) et, enfin,
l’essai de l’instrument. »
Bien que son atelier soit une entreprise
avec tout ce que cela suppose comme tracasserie de gestion, de la rareté de la
matière première et de la main- d’oeuvre , tout en se désolant que bon nombre
de structures dédiés à l’apprentissage de la musique et des instruments recourt
à l’importation pour équiper les écoles au lieu de faire travailler une entité
algérienne, Rachid Châffa décline toute question relative à la vie de son
entreprise.
Se contentant de dire que les
difficultés qu’il rencontre « sont celles de la quasi-totalité des artisans
algériens, notamment l’inexistence d’une politique de formation qui permette la
transmission du métier aux générations futures » et de rappeler, un peu
comme pour dire que son métier est ancestral, que l’entreprise Châfaa a équipé
des chantres tels que Hadj L’Aanka, Boudjemâa Lankiss, Hamdi Benani, Matoub
Lounès, Ait Manguelat, Takfarines et bien d’autres .»
Les Châfaa confectionnent des pièces
exceptionnelles et parfois uniques comme la fameuses guitare à double manche de
Takfarines que nous avons été les premiers à fabriquer dans le monde
arabe.
L’idée venait de l’artiste, il en a
imaginé une et moi une autre. Quand Takfarinas a vu la maquette, il a tout de
suite validé»
L’entreprise de Châfaa, même si elle est
«une toute petite entreprise familiale», jouit d’une très grande notoriété dans
le monde musical.
Par
Rabah Nadri
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