jeudi 11 janvier 2018

Ighil Mahni...

































mensi umenzu n yennayer

Le repas, préparé pour la circonstance, est assez copieux et différent du quotidien, les rites sont effectués d’une façon symbolique, ils sont destinés à écarter la famine, augurer l’avenir, consacrer le changement et accueillir chaleureusement les forces invisibles, selon la croyance.

Pour la préparation de « imensi n yennayer », on utilise la viande de la bête sacrifiée (asfel), souvent de la volaille, mélangée parfois à la viande séchée (acedluh) pour agrémenter le couscous, élément fondamental de l’art culinaire berbère, le plus aisé affiche sa différence, il sacrifie une volaille par membre de la famille.


Le coq est pour l’homme (sexe masculin) et la poule pour la femme (sexe féminin), un coq et une poule sont attribués à la femme enceinte dont l’espoir qu’elle n’accouche pas d’une fille qui était hélas souvent mal accueillie au sein du système patriarcal de certaines tribus.


En revanche, le premier yennayer suivant la naissance d’un garçon était d’une grande importance, le père effectue la première coupe de cheveux au nouveau né et marque l’événement par l’achat d’une tête de bœuf.


Ce rite augure de l’enfant le futur responsable du village. Il est répété lors de la première sortie du garçon au marché. Il est transposé, dans les mêmes conditions, à la fête musulmane chiite de l’achoura, dans certaines localités berbérophones.


« Imensi n yennayer » se poursuit tard dans la nuit et la satiété est de rigueur, c’est même désobligeant pour la maîtresse de la maison (tamgart n wexxam) de ne pas se rassasier.


Il est aussi un repas de communion, et il se prend en famille, on réserve la part des filles mariées absentes à la fête, on dispose autour du plat commun des cuillères pour signaler leur présence.


À travers les génies gardiens, les forces invisibles participent au festin par des petites quantités déposées aux endroits précis, le seuil de la porte, le moulin de pierre aux grains, le pied du tronc du vieil olivier, etc. et la place du métier à tisser qui doit être impérativement enlevé à l’arrivée de yennayer. Sinon les forces invisibles risqueraient de s’emmêler dans les fils et se fâcheraient, ce qui est mauvais pour les présages.


« Amenzu n yennayer » détermine la fin des labours et marque le milieu du cycle humide, les aliments utilisés durant ce mois sont les mêmes que ceux de la période des labours, la nourriture prise est bouillie, cuite à la vapeur ou levée, les aliments augmentant de volume à la cuisson sont de bons augures.


La récolte présagée sera d’une grande quantité, les différentes sortes de couscous, de crêpes, de bouillies, etc., et les légumes secs les agrémentant apparaissent.


Les desserts servis seront les fruits secs (figues sèches, abricots secs, noix, etc.), de la récolte passée, amassés dans de grandes et grosses cruches en terre pourvues d’un nombril servant à retirer le contenu (ikufan).


Le mois de yennayer est marqué par le retour sur terre des morts porteurs de la force de fécondité.

Durant la fête, les femmes ne doivent pas porter de ceinture, symbole de fécondité. Celles transgressant la règle subiraient le sortilège de la stérilité. « Imensi n yennayer » nécessite des préparatifs préalables.

Dans les Aures et en Kabylie, la veille, la maison est méticuleusement nettoyée et embaumée à l’aide de diverses herbes et branches d’arbres (pin, etc.), elle ne le sera plus, durant les trois jours suivants sinon le balai de bruyère, confectionné pour la circonstance par les femmes lors de leur sortie à la rencontre du printemps (amagar n tefsut), blesserait les âmes errantes, on procède au changement des pierres du kanun (inyen n lkanun).


Tous les gestes accomplis pendant la fête se font avec générosité et abondance, les participants à la célébration, estiment recevoir, par leurs actions, la bénédiction des forces invisibles circonscrivant chez le berbère son univers de croyance....
 
                                                                                                                                                                              
                                                                                                                                                                                 A suivre



*Photo prise en 2016

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