Charlemagne,
Tu ne sais pas.
Combien, ça peut mettre
En colère
Ces tas de trucs qui font mal au coeur
Et dont tout le monde
Se fiche
Ces asiles pour courants d'air
Ces dortoirs pour souris
Ces chienschiens aux mémères
Et ces bisness in bisness
Je me demande, moi
A quoi ça sert
Les barrages qui barrent
Et les routes bien tracées
Et les camions qui écrasent les petites
Yasmina de neuf ans
En roulant entre les estomacs à l'air comprimé
Et les peaux en papier d'emballage.
J'étais là, quand le
Camion l'a écrasée
Et quand le sang a giclé
Le sang.
Et alors là, je ne raconte pas...
Je laisse aux gens qui ont déjà vu un camion
Ecraser un bonhomme et du sang
Gicler
Le privilège de se
Rappeler
L'horreur
Et le dégoût et puis la fuite lâche
Devant un cadavre
Surtout devant le cadavre d'une
Petite fille innocente
Et le privilège aussi
Pour les Chrétiens le Vendredi-Saint
Pour les Musulmans le Ramadhan
Pour les Juifd le Youm-Kippour
Pour les Athées les jours de cloches sonnant à toute
Volée dans la nef déserte d'un estomac affamé
Pour les Chinois les jours de pleine lune et de
Jiu-jitsu, hara-kiri.
De se rappeler leurs faims
Et d'en assaisonner
Ce cadavre de petite fille
Et le privilège aussi
Pour la mission Paul Emile-Victor au Pôle
Nord
Pour les vainqueurs de l'Annapurna
Qui ont eu les doigts d'abord gelés et puis coupés
D'apporter de l'eau à mon moulin
Et un peu de neige
Pour conserver dans ma mémoire
Et ma colère et mon dégoût
Le cadavre
De la petite Yasmina
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire