mercredi 14 avril 2010

Ourida Meddad....Azeffoun les environs....La Casbah !


















Les révélations d’un ancien para, par Florence Beaugé 

(Première partie)

Dans "Algérie, une guerre sans gloire», où elle nous fait revivre de l’intérieur ses enquêtes pour le Monde, Florence BEAUGE publie un nouveau témoignage accablant pour le général Schmitt, ancien chef d’état-major des armées.
Ci-dessous les extraits du livre de Florence BEAUGE qui ont été publiés dans le Nouvel Observateur du 8 septembre 2005. 

....L’été 1957, comme chaque année en cette période estivale, l’école Sarouy s’est vidée de ses élèves. Le 3e RPC du colonel Bigeard réquisitionne le bâtiment.
De mi-juillet à début septembre, la compagnie d’appui va s’y installer, avec deux hommes à sa tête : le capitaine Raymond Chabanne et son adjoint, un certain lieutenant Maurice Schmitt.
L’école Sarouy, lieu d’enseignement et de savoir, va devenir un centre d’interrogatoires et de torture, l’un de ceux qui s’inscriront durablement dans les mémoires à Alger, comme la villa Susini, le palais Klein ou le Café-Bains Maures. [...] Comment les survivants de l’école Sarouy peuvent-ils être sûrs, si longtemps après, que l’homme qui a orchestré leurs tortures, l’été 1957, était bien Maurice Schmitt ?
Interrogés séparément, les uns et les autres font la même réponse, les tortionnaires, disent-ils, "s’interpellaient sans gêne les uns les autres, devant nous". Il était "normal et banal, à l’époque, de passer les suspects à l’électricité, à l’eau ou au supplice de la bouteille".
La torture faisait partie d’un système. "Personne, soulignent-ils, ne songeait à cacher son identité à l’école Sarouy."
Par ailleurs, chacun de ces témoins a eu l’occasion, des années plus tard, de revoir le général Schmitt à la télévision française - captée en Algérie par satellite et très regardée - ainsi que dans des magazines.

Certains ont reconnu leur ancien tortionnaire au moment de la guerre du Golfe, au début des années 1990, et découvert alors "avec stupéfaction", disent-ils, qu’il était devenu chef d’état-major... [...]
Hani Mohamed, dit Lyès Hani, est né le 22 mars 1929, de petite taille, les yeux étonnamment clairs, le cou toujours entouré d’un keffieh à carreaux noirs et blancs, cet homme vif et rieur est entré très jeune dans la résistance à l’occupation française, il est d’abord membre de l’Organisation spéciale (OS) puis rejoint le FLN lorsque éclate la révolution, en novembre 1954.
Quand Alger est découpée en trois régions, Lyès Hani est nommé responsable militaire de la région II, arrêté le 17 août 1957, il est conduit à l’école Sarouy.
On veut lui faire dire le nom des membres de son réseau, "On m’a d’abord mis nu, puis on m’a fait monter au premier étage, dans la salle des tortures.
Il y avait là une grande bassine, pour le supplice de l’eau, on m’a passé à l’électricité, puis à l’eau, raconte-t-il en montrant les lieux.
Le lieutenant Schmitt était présent, Il a toujours été là, pour chacune de mes séances de torture, une dizaine environ.
C’est lui qui donnait les ordres, il disait : “Arrête, continue, arrête.”, c’était le patron, le lieutenant F., un homme sanguinaire, exécutait les ordres.
C’était l’été, il faisait chaud, les tortionnaires étaient souvent torse nu, l’un d’eux avait une grosse cicatrice, une sorte de plaque, sur l’épaule ou l’omoplate. Il disait que c’était une blessure qu’il avait ramenée d’Indochine."
Lyès Hani a le souvenir d’une "autre brute", un certain Babouche, un proxénète de la Casbah, acquis à l’armée française, tous les survivants de l’école Sarouy parlent de ce préposé aux basses œuvres.
Babouche, considéré comme un traître et un assassin par le FLN, sera étripé, au sens propre du terme, en pleine rue, en 1958, Lyès Hani lui attribue de nombreux viols à l’école Sarouy, l’été 1957.
L’ancien responsable militaire de la région, ne s’étend pas sur ce qu’il a subi, il préfère témoigner pour ceux qui ne sont plus là, en particulier son adjoint BERREKIA Mohamed, dit Fodil, ainsi qu’un menuisier, Aichkadra.
Lyès Hani s’indigne du fait que le général Schmitt ait pu écrire dans son livre "Alger, été 1957" que l’un et l’autre ont été tués dans un accrochage, ces deux hommes, témoigne-t-il, sont morts sous la torture, l’été 1957, à l’école Sarouy.
"Les tortures qu’on m’a infligées, à moi, je l’admets, ce que je ne pardonne pas, ce sont tous ces mensonges pour tenter de cacher la vérité"....A suivre 


Illustrations Daboudj1948

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